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What a wonderful world.

Les raisons de la discorde.

8 Juin 2019

Il est sept heures, samedi matin. Et je n'arrive plus à dormir. Fort bien! Voilà deux semaines que je m'exerce de me réveiller à six pour avoir plus de temps pour lire. Mes efforts portent leurs fruits.

C'est une belle journée de juin. Le soleil brille dehors, le chat est - relativement - calme, et je suis - presque - en vacances.
Et pourtant je tourne et retourne dans mon lit, une boule dans la gorge et les yeux écarquillés. La raison? Dans mon manuscrit, une fois ou deux, j'ai utilisé le mot cheffe.

Je suis féministe. Je ne laisserai personne remettre ça en question. Je suis une féministe de la première heure, qui se définissait comme telle dès la primaire. J'ai été féministe partout où je suis allée, je l'ai toujours été même dans les situations où je savais que ça me pénaliserait, et je suis bien déterminée à tenir cette position jusqu'à la fin de ma vie. Non mais.

Mais la féminisation des mots, je ne peux pas. Je trouve ça trop abjecte.
Déjà, de une, je pense que c'est une sacrée erreur que de vouloir imposer ça. Ça ne rendra pas les sociétés francophones plus égalitaires. La théorie que l'on perçoive le monde tel que notre langue le met en mots est erronée; bon, il n'y en a pas qu'une seule de théorie sur le sujet, et les linguistes n'ont pas fini de se bouffer le nez, mais dans l'ensemble on sait maintenant que c'est faux. Dans notre cas, il y a des langues où il n'y a pas de distinction féminin/masculin et où le sexisme est encore plus grand qu'en France, et inversement. Si ça vous intéresse, allez sur DuckDuckGo (et non pas fuckin Google) et cherchez Sapir-Whorf.
Quant à Chomsky, je ne peux pas l'affirmer, mais je suis à peu près sûre qu'il fait référence à la grammaire universelle.

D'autre part, je suis personnellement horripilée par le fait de devoir être constamment rattachée à mon sexe. Merde, quoi. Je sais que je suis une femme, et je n'ai pas besoin qu'on me le souligne à chaque fois... Sans déconner, ça me rappelle l'école primaire, quand c'était la plus grande infamie que d'être, d'une façon ou d'une autre, affiliée au genre opposé. Qu'est-ce que ça pouvait me saouler à l'époque... Et dire que j'espérais que ce genre de bêtises passent avec l'âge...

Je suis écrivain. Étudiante. Libraire. Et je travaille à devenir auteur, docteur et psychologue. Point barre. On est en 2019, merde, les hommes ont le droit de porter des jupes et Manon Massé a gardé sa moustache. La guerre des pantalons est passée depuis longtemps. Je ne demande pas à porter la barbe, mais bordel, laissez-moi tranquille. Je n'ai pas besoin qu'on me rappelle tout le temps que j'ai un utérus, je vous jure.

Par ailleurs, et je cite, [l'académie française]  estime que, « s’agissant des appellations utilisées dans la vie courante (entretiens, correspondances, relations personnelles) concernant les fonctions et les grades, rien ne s’oppose, à la demande expresse des individus, à ce qu’elles soient mises en accord avec le sexe de ceux qui les portent et soient féminisées ou maintenues au masculin générique selon le cas ». 

 

Alors qu'on ne vienne pas me dire que je suis une faute de français.
Mais bon, si vous saviez comme ils méprisent l'académie française, au Québec... et je crois que c'est réciproque.

 

Il se trouve que le dico de l'A.F. ne reconnait pas le mot cheffe. Jeu, set et match, je vais changer tout ça !
Oui, mais.
Est-ce que je peux dire la chef ? Est-ce que je suis une écrivain ? À titre purement personnel, j'ai toujours fonctionné comme cela... et c'est, je crois, un anglicisme que de considérer le mot comme se suffisant à lui même, sans son déterminant.
Bordel. Bordel, bordel, bordel. Ce foutu manuscrit, je vais l'envoyer à des dizaines d'éditeurs parisiens, qui, eux, respectent l'académie française. Et la moindre faute de français peut être fatale. N'est-il pas mieux finalement que j'écrive la cheffe que la chef? Non parce que mine de rien, ce n'est pas pour rien si le chef des druides est une femme, c'est volontaire tout de même. J'y tiens moi, à mes personnages féminins forts, qui dirigent et prennent des décisions.

Nous sommes samedi, huit heures du matin, et j'ai des aigreurs d'estomac.

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